DocumentMax Weber Les facteurs de légitimation du pouvoir politique
        « Il existe en principe ‑ nous commencerons par là ‑ trois raisons 
        internes qui justifient la domination, et par conséquent il existe trois 
        fondements de la légitimité.
        Tout d'abord de l’ « éternel hier », c’est‑à‑dire celle des 
        coutumes sanctifiées par leur validité immémoriale et par l’habitude 
        enracinée en l’homme de les respecter. Tel est le « pouvoir 
        traditionnel » que le patriarche ou le seigneur terrien exerçaient 
        autrefois. En second lieu l’autorité fondée sur la grâce personnelle et 
        extraordinaire d’un individu (charisme); elle se caractérise par le 
        dévouement tout personnel des sujets à la cause d’un homme et par leur 
        confiance en sa seule personne en tant qu’elle se singularise par des 
        qualités prodigieuses, par l’héroïsme ou d’autres particularités 
        exemplaires qui font le chef. C’est là le pouvoir « charismatique » que 
        le prophète exerçait, ou ‑ dans le domaine poli tique ‑ le chef de 
        guerre élu, le souverain plébiscité, le grand démagogue ou le chef d’un 
        parti politique. Il y a enfin l’autorité qui s’impose en vertu de la 
        « légalité », en vertu de la croyance en la validité d’un statut légal 
        et d’une « compétence » positive, fondée sur des règles établies 
        rationnelle ment, en d’autres termes l’autorité fondée sur l’obéissance 
        qui s’acquitte des obligations conformes au statut établi. C’est là le 
        pouvoir tel que l'exerce le « serviteur de l’État » moderne, ainsi que 
        tous les détenteurs du pouvoir qui s’en rapprochent sous ce rapport. 
      
      
      
      
      II va de soi que, dans la réalité, des motifs extrêmement puissants commandés par la peur ou par l’espoir conditionnent l’obéissance des sujets ‑ soit la peur d’une vengeance des puissances magiques ou des détenteurs du pouvoir, soit l’espoir en une récompense ici‑bas ou dans l’autre monde; mais elle peut également être conditionnée par d’autres intérêts très variés […]. Quoi qu’il en soit, chaque fois que l’on s’interroge sur les fondements qui « légitiment » l’obéissance, on rencontre toujours sans contredit ces trois formes « pures » que nous venons d’indiquer. » Le savant et le politique, 1919, Plon, 1963, p. 102‑103. 
 
       
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