Bernard Weber    L'empire des anges

Chez Livre de poche

Genre : Roman essai

 Thème : destinée, mort, responsabilité


   Ne faites pas comme moi, ne lisez pas avant sur le même sujet Enquête sur l'existence des anges gardiens et Les dialogues avec l'ange de Gita Mallaz. Vous seriez déçu. Le livre de Weber est introductif, conçu pour un très large auditoire, il joue avec la question sur un ton de plaisanterie et sans trop se mêler des difficultés de fond. La différence entre l'existence de l'ange et l'existence humaine est floue. L'âme sans l'incarnation de la chair peut-elle vraiment avoir un esprit identique? Il y a fort à parier que la qualité de perception et l'étendue de la sensibilité serait démultipliée bien au-delà de l'humain ordinaire.

Sur ce plan là, c'est un livre qui a une réelle valeur au sens où il laisse en suspend beaucoup de questions qu'il permet de poser Un livre irritant dans le bon sens : il provoque nécessairement la réflexion. Weber pose très bien le problème de la destinée et de la responsabilité humaine. Il montre très bien en quel sens chacun est créateur de sa propre vie, mais en même temps, porte aussi en lui la trace compulsive d'un passé qui ne cesse de revenir. Là dessus, la lecture est typiquement indienne. Il a très bien assimilé l'essentiel de la théorie du karma. Là bravo. Ce qui est important, c'est de souligner que la théorie du karma explique que toute action entraîne une réaction qui revient vers son auteur où qu'il soit. Comme une lettre qui vous suit, même quand vous déménagez. On récolte ce que l'on a semé. Mais ce n'est pas une "punition", ni une "gratification" divine. C'est purement mécanique cela n'a rien de moral. C'est pour cela que le bouddhisme, en se passant de l'existence de Dieu, admet la théorie du karma. C'est un mécanisme de prakriti, la Nature. Je reste très sceptique sur les bon-point accumulé pour la conscience et cet histoire de niveaux chez Weber. Le passage allez et venir entre la terre et le ciel fait partie du samsara indéfiniment, tant que l'individualité n'a pas été dissoute en tant qu'ego. Le samsara est une sorte de galère dont il faut parvenir à se délivrer et pour le bouddhisme il y a aussi des stations d'enfer et de paradis entre les incarnations. De naissance en naissance, le flux de la conscience s'enrichit et s'éclaire, comme s'il fallait passer par toute les expérience pour revenir au sein de l'Absolu.

    L'histoire de Weber est bien menée et tout à fait fascinante et pathétique par moments. C'est justement ce côté qui est touchant et qui donne un peu de poids au livre. C'est le meilleur du livre.  Ce que dirait la théorie du karma, c'est qu'il y a dans l'inconscient de chacun des personnage des traces du passé non-résolu qui le presse à répéter les mêmes expériences, ce sont les vasanas qui agglomérés donnent les samskara, les tendances qui orientent les désirs inconsciemment. Tant que les noeuds du coeur ne sont pas résolus, les samskaras ont un effet puissant de compulsion. Voyez le livre de Denise Desjardin De naissance en naissance. Une femme qui a vu mourir son enfant sous ses yeux dans une vie précédente, garde une peur panique incompréhensible devant les enfants, elle se retrouve encore devant des situations de danger, comme si elle devait surmonter ce blocage lié à des tendances passées. Satprem raconte dans ses Lettres d'un insoumis qu'il a dû se faire aider par un yogi en Inde, car il y avait en lui une très dure expérience qui revenait qui l'avait précédemment mené au suicide. Il raconte qu'il a dû affronter la puissance des forces inconscientes liées au samskara et passer l'épreuve pour s'en libérer.

Noter à ce titre que dans la pensée indienne, la seule expérience valide se fait sur terre, les cieux n'ont aucun intérêt. Ce n'est pas du tout comme le chrétien qui espère aller au paradis. Dans sur terre dans un corps de chair que l'évolution s'accomplit vraiment. C'est une opportunité exceptionnelle de disposer de ce corps, perdre cette opportunité pour ne pas trouver le Soi dans cette vie, c'est comme vendre un diamant au prix des épinards ! (ce que disait un maître contemporain).

Le mérite principal du livre de Weber est son caractère très accessible, une tentative d'interprétation synthétique. C'est un bon livre pour celui qui tente de trouver des repères sur la vie, la mort, la destinée, l'au-delà etc. Un peu comme Lobsang Rampa il y a 20 ans, avec exactement le même rôle. Philosophiquement, tout est à reprendre dans le détails pour donner plus de logique et d'approfondissement. Par exemple, je signale sur la théorie du karma, le livre de Shri Aurobindo, Renaissance et karma aux éditions du Rocher qui rend vraiment justice à la complexité du sujet.

Denis Salgedo


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