Jean-Pierre Geay 
    Pouvez-vous m'expliquer une expression que 
    vous utilisez dans le cours de philosophie et que je ne comprends pas . Il 
    s'agit de la leçon 7 sur '' Les Formes de l'Illusion '' . A la page 2 , vous 
    écrivez : ''L'esprit , l'organe interne du mental '' ... Afin de comprendre 
    cette expression , j'ai essayé de définir les mots utilisés mais, peine 
    perdue , elle m'est demeurée toujours aussi nébuleuse . Il faut dire que ma 
    fréquentation assidue de ce qu'il est convenu d'appeler l 
	
   'Esotérisme 
    contribue certainement à mon incompréhension .Le mot ''esprit '' y reçoit 
    une acception exclusivement spirituelle , c'est-à-dire immatérielle ( et 
    statique ). .Le mental est l'instrument de l'esprit , et en fait même partie 
    dans son aspect abstrait , et se matérialise , en quelque sorte , pour 
    devenir l'intellect , miroir réflecteur de nos perceptions ainsi que matière 
    subtile de nos pensées concrètes et de nos représentations . Et je me rends 
    bien compte qu'il me faut faire table rase de ces '' connaissances '' 
    particulières pour avoir accès à l'enseignement de la Philosophie . Je vous 
    pose donc les questions suivantes : - quelle est , dans ce cours , la 
    définition du mot '' esprit '' ? - quelle est encore la définition du mot '' 
    mental '' ? - que signifie enfin l'expression '' l'esprit ,l'organe interne 
    du mental ? J'avoue ne pas avoir eu le courage de plonger dans un 
    dictionnaire de philosophie pour aborder ces grandes questions car il m'a 
    semblé que je risquais de m'y perdre davantage .Je me suis contenté des 
    définitions apportées par Le Grand Robert mais n'en ai nullement été éclairé 
    .  R. Dans ce 
    cours, l'esprit est désigné comme le mental, faculté qui produit 
    toutes nos constructions mentales. En d'autres termes nos 
    représentations, ce qui inclut nos théories. Cependant, psychologiquement, 
    en raison de la compulsion émotionnelle, l'esprit peut produire des 
    construction mentales qui sont de pures fictions, des illusions. 
    L'intellect est la pensée discriminative, (viveka en sanskrit) qui 
    fonctionne beaucoup dans la dualité. Il y a dans les fonctions de l'esprit 
    une faculté plus intuitive, le voir intuitif, qui est 
    l'intelligence (buddhi en sanskrit). Rousseau dit que la pensée 
    constitue un "sixième sens", un sens interne en quelque sorte et qui est 
    dévoué à la représentation. Pour plus d'explication voir la seconde leçon 
    sur l'illusion.   
    
    Sandrine Petijean Je suis en train de relire votre livre 
	concernant l’inconscient. Et il y a quelques temps, j’avais aussi lu celui 
	concernant l’illusion. Et les deux fois, je me suis fait -entre autre- cette 
	même remarque : Comment se fait-il que Serge Carfantan, qui présente une 
	telle ouverture d’esprit et qui a fait tant de recherches sur des sujets 
	parfois considérés comme « limites » dans un cadre universitaire « 
	mainstream » (les NDE, les chakras, la synchronicité, la pensée orientale, 
	etc., sans compter que vous faites partie des philosophes qui semblent avoir 
	VRAIMENT lu C.G. Jung, et non, qui se contentent de l’écarter d’un geste 
	méprisant comme un « simple mystique », ce qui est méritoire en France…), 
	donc comment se fait-il que vous n’ayez jamais traité cet autre sujet « 
	limite », pourtant étudié de façon tout à fait scientifique aujourd’hui dans 
	les laboratoires de psychologie, qu’est le rêve lucide ?... Car lorsque vous 
	parlez du rêve nocturne -du moins pour ce qui concerne les leçons que j’ai 
	lues- vous avez tendance à l’appréhender toujours sous le même angle : la « 
	conscience » (celle du sujet authentique) disparaît, même si une forme de 
	conscience subsiste (sans quoi on ne se rappellerait pas d’avoir rêvé), et 
	l’illusion constituée par le rêve n’est jamais démasquée comme telle par le 
	sujet rêvant.  
         Mais lorsque vous dites ça, 
    vous parlez en fait du rêve ordinaire, qui possède notamment deux 
    caractéristiques : 1° Le sujet n’a pas conscience de rêver, 2° la 
    remémoration d’un tel rêve est toujours imparfaite au réveil, ce qui 
    signifie qu’on ne peut en réalité savoir, en l’état, si le rêve était aussi 
    chaotique qu’il paraît, et quelle était la qualité réelle de notre 
    expérience onirique (notamment sur le plan sensoriel). On confond souvent le 
    souvenir du rêve -nécessairement fragmentaire et altéré- avec l’expérience 
    onirique elle-même -à laquelle on n’a justement plus accès. La même 
    différence existe, si on y réfléchit, entre une expérience vécue au présent 
    (extrêmement riche, complexe, sur les plans sensoriel et psychologique), et 
    le souvenir de cette même expérience, ranimé ultérieurement, qui est 
    toujours très appauvri et incomplet. Nos souvenirs ne sont en règle générale 
    qu’une pâle copie de ce que nous avons vraiment vécu -à une exception près : 
    le souvenir « corporel », le fait de revivre les choses, à la faveur de la 
    mémoire du corps, et non de s’en souvenir seulement mentalement. Mais il 
    s’agit d’une forme de remémoration assez rare, qu’il faut susciter 
    volontairement (notamment dans des cadres thérapeutiques : thérapie primale, 
    rebirthing, hypnose, etc…).  
        Mais outre ces quelques 
    remarques que l’on peut faire au sujet du rêve ordinaire, il y a aussi la « 
    révolution copernicienne » vécue par celui qui fait ce qu’on appelle un rêve 
    lucide (et si j’en parle, c’est parce que ça m’est arrivé). Au point qu’il y 
    a des fois où je me dis : « quel dommage que Serge Carfantan ne se soit 
    apparemment jamais retrouvé à expérimenter un rêve lucide, parce que là, il 
    y a vraiment de quoi donner à penser à un philosophe pour un moment ! »... 
    Je précise qu’il y a une différence entre lire des témoignages de personnes 
    ayant vécu ce type d’expérience (et elles sont nombreuses) et le vivre 
    soi-même. Car il n’y a que lorsqu’on le vit soi-même que l’on peut vraiment 
    mesurer, par expérience directe, à quel point il n’y strictement AUCUNE 
    différence, en matière de qualité perceptuelle, entre le rêve lucide et la 
    réalité. Et on y présente, qui plus est, une conscience de soi intacte.
     
         Pour vous donner un exemple 
    personnel concret : lors d’un rêve lucide spontané (je ne contrôle pas ce 
    genre de phénomène, mais ça m’arrive parfois), je m’étais retrouvée dans une 
    grande ville de province, qui me faisait un peu penser à Saumur. Je me 
    trouvais debout au milieu d’une rue, à observer les gens passer. Et en même 
    temps, j’avais une conscience parfaitement lucide du fait que je me trouvais 
    au même moment dans mon lit, et donc que j’étais en train de rêver ; je me 
    souvenais aussi parfaitement de qui j’étais, de mon histoire (donc ma 
    conscience était tout à fait similaire à ma conscience de veille). Et comme 
    le réalisme de ce qui m’entourait me sidérait, je me suis même approchée de 
    la façade d’un bâtiment : j’ai frotté mon index contre la pierre calcaire de 
    cet immeuble, pour constater que le réalisme dans le détail de ce rêve était 
    tel qu’une fine poussière blanche se déposait sur le bout de mon doigt, 
    comme dans la réalité. J’ai parlé à des gens, aussi (notamment pour demander 
    mon chemin), qui ont eu un comportement parfaitement conforme à ce qu’il est 
    en général dans la réalité. D’ailleurs, lorsque j’ai vu ça, j’ai même 
    repensé à l’un des extraits du film Matrix (que je me souvenais donc 
    parfaitement avoir vu), celui où Morpheus demande à Neo : « Si tu ne 
    parvenais jamais à sortir de ce rêve, comment parviendrais-tu à le 
    distinguer de la réalité ? » (ma mémoire était donc vraiment excellente, 
    dans ce rêve, aussi précise que dans la réalité). Eh bien, force m’a été 
    d’admettre à ce moment-là, alors que je me trouvais plantée au beau milieu 
    de cette ville onirique, en pleine lucidité, que je n’aurais été fichue de 
    faire la moindre différence… Sur le moment, ça fait presque peur, même !! Ca 
    a un côté très angoissant. Parce qu’en plus on ne sait même pas comment se 
    réveiller (le réveil se déclenche automatiquement à moment donné, mais ce 
    n’est pas nous qui actionnons le « levier de commande » !).  
        Donc comme ça fait 
    plusieurs fois que je lis, dans vos, des propos du genre « le rêve est une 
    illusion ; dans le rêve la conscience est altérée, la conscience de veille 
    disparaît », etc., j’avais envie d’attirer votre attention sur ce phénomène 
    du rêve lucide, au cas où un jour vous auriez le temps de vous y pencher. 
    Parce que je serais personnellement très intéressée d’avoir un jour votre 
    avis sur la question…  
         En tout cas je vous 
    remercie pour vos travaux, qui m’ont personnellement beaucoup apporté (et 
    qui continuent !), et en particulier pour votre curiosité et votre grande 
    ouverture d’esprit, très appréciables en France.  
    	    Contributions et questions sont ajoutées ici.  
 
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