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Textes philosophiquesMontaigne La diversité d'opinion
Le fait qu'on ne voit aucune thèse qui ne soit débattue et controversée entre nous,ou qui ne puisse l'être, montre bien que notre jugement naturel ne saisit pas bienclairement ce qu'il saisit, car mon jugement ne peut pas le faire admettre par le jugement de mon semblable : ce qui est le signe que je l'ai saisi par quelque autre moyen que par un pouvoir naturel qui serait en moi et en tous les hommes.Laissons de côté cette confusion infinie d'opinions que l'on voit parmi lesphilosophes eux-mêmes, et ce débat perpétuel et général sur la connaissance des choses. On a tout à fait raison, en effet, d'admettre que sur aucune chose les hommes – je veux dire les savants les mieux nés, les plus capables – ne sont d'accord, pas même sur le fait que le ciel est sur notre tête, car ceux qui doutent de tout doutent aussi de cela ; et ceux qui nient que nous puissions comprendre quelque chose disent que nous n'avons pas compris que le ciel est sur notre tête ; et ces deux opinions sont, par le nombre, incomparablement les plus fortes. Outre cette diversité et cette division infinies, par le trouble que notre jugement nousdonne à nous-mêmes et par l'incertitude que chacun sent en lui, il est aisé de voir que ce jugement a son assise bien mal assurée. Comme nous jugeons différemment des choses ! Combien de fois changeons-nous d'opinions ! Ce que je soutiens aujourd'hui et ce que je crois, je le soutiens et le crois de toute ma croyance ; toutes mes facultés et toutes mes forces empoignent cette opinion et m'en répondent sur tout leur pouvoir. Je ne saurais embrasser aucune vérité ni la conserver avec plus de force que je ne fais pour celle-ci. J'ysuis totalement engagé, j'y suis vraiment engagé ; mais ne m'est-il pas arrivé, non pas une fois, mais cent, mais mille, et tous les jours, d'avoir embrassé quelque autre opinion avec ces mêmes instruments, dans ces mêmes conditions, opinion que, depuis, j'ai jugée fausse ? Les Essais. Indications de lecture:Sujet donné en 2019 au bac. Il s'agit typiquement d'une défense du relativisme admettant à juste titre que toutes les opinions sont relatives. Voir la leçon Sur le relativisme. C''est le cas de nos croyances. Toutes nos croyances sont en effet révisiables car la croyance n'est pas la vérité. Voir surtout la leçon Le monde des opinions. C'est juste une option sur la vérité, uen manière de pointer vers, mais rien de plus. De même aucune opinion ne peut posséder la vérité, mais juste en donner un aperçu pertinent. Notons que l'homme de l'opinion commune ne se pose jamais la question, il affirme ses opinions comme si c'était la vérité. Montaigne veut nous pparendre à regarder nos opinions comme des prises de position dont nous pourrions éventuellement nous défaire. Mais l'homme de l'opinion s'accroche à ses idées : il veut faire deux camps, ceux qui ont tort, ceux qui ont raison! Le bon côté du scepticisme de Montaigne, c'est qu'il nous apprend à suspendre notre jugement. Le sujet du bac était accompagné des instructions suivantes: Pour expliquer ce texte, vous répondrez de manière
explicite, précise et développéeaux questions suivantes, qui sont destinées à
guider votre rédaction. [B] – Eléments de synthèse
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