Leçon 44.   Science, technique et tradition        pdf téléchargement     Téléchargement du dossier de la teçon

    Le terme de technique est tellement identifié à la technique scientifique, que nous en oublions parfois qu’il peut très bien y avoir des formes de techniques, sans la science, la preuve en est le savoir-faire de l’artisan ou les techniques artistiques. Dans l'art et le savoir faire, il y a aussi une tradition de transmission des méthodes et d’un savoir, mais ce savoir n’est pas celui qui est tiré d'une science.

    La relation entre la science et la technique est logique et rationnelle. S’il peut y avoir un progrès technique, c’est parce que la science peut se transmettre, s’enseigner clairement par concepts. D’autre part, l’immense avantage de la technique scientifique, c’est d’être susceptible d'un perfectionnement indéfini. D’où l’incroyable obsolescence des objets techniques. Un objet technique est comme emporté dans un temps accéléré, il est souvent dépassé, au moment même où on l'achète. Nous sommes autant fascinés par les prodiges des inventions techniques que par le progrès lui-même. Nous admirons dans l'inventivité technique une créativité qui surpasse de beaucoup le savoir-faire traditionnel. Le savoir faire traditionnel garde un caractère plus statique. La technique, cela va vite, cela va très vite. Dès lors ne faudrait-il pas marquer des différences radicales entre les techniques traditionnelles et la technique modernes ? Il faut aussi préciser en quel sens on parle de technique en l’absence de science. En d’autres termes : Peut-on concevoir une technique là où il n’y a pas de science ?

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A. La technique précède la science

    ...de l’anthropologie, que l’apparition de l’homme coïncide avec celle du langage et le maniement des outils. L’homme a été homo-faber, avant d’être homo-sapiens, explique Bergson, parce qu’il a été ingénieux, avant d’être intelligent, et intelligent au sens où on l’entend aujourd’hui, c'est-à-dire intellectuel. Son ingéniosité lui a permis de s’adapter à des conditions de vie hostiles. Le corps de l’homme est en effet bâti pour rendre possible la préhension de l’outil. En effet, non seulement la station verticale a chez l'homme libéré la main, en en faisant autre chose qu’un moyen de locomotion comme le sont les jambes, mais la main humaine est remarquablement bien constituée pour la préhension de l’outil. L’opposition nette du pouce et des autres doigts favorise une prise en main solide. Comme le dit Aristote, dans Les Parties des Animaux : « ce n’est pas parce qu’il a des mains que l’homme est le plus intelligent des animaux, mais c’est parce qu’il est le plus intelligent qu’il a des mains. En effet, l’être le plus intelligent est celui qui est capable d’utiliser une grand nombre d’outils : or, la main semble bien être non pas un outil, mais plusieurs ». Il serait ridicule de considérer l’homme comme inférieur, parce qu’il n’a pas de carapace ou de pinces, grâce à ses mains il peut se doter de tout ce qui lui est nécessaire, « la main devient griffe, serre, corne, ou lance ou épée ou toute autre arme ou outil. En grec l’outil est organon, complément de l’organisme. Elle peut-être tout cela, parce qu’elle est capable de tout saisir et de tout tenir ». (texte) L’homme n’a donc pas attendu la science __________

dans l’élaboration des techniques: le savoir-faire empirique et le savoir scientifique. Ce n’est que dans le second cas que la théorie précède la pratique, dans le premier, c’est l’inverse qui a lieu. L’urgence des nécessités vitales, la conservation de soi, la pression du milieu ont conduit les hommes à se doter d’instruments souvent très sophistiqués. Considérons la pirogue. Sans avoir une seule notion de physique des fluides des peuples que l'on dit «primitifs" (au regard de notre technique occidentale), ont su réaliser un instrument admirablement bien adapté à sa fonction. L’arc et la flèchesont des réalisations très ingénieuses. Avant de connaître la théorie du levier, on savait déjà très bien s’en servir. Que dire alors de l’utilisation des plantes dans de nombreuses cultures ! La culture et la préparation des plantes médicinales utilisent des procédés extrêmement complexes et ingénieux et qui ont une efficacité parfois étonnante, sans que les peuples traditionnels ait la moindre notion modernes de pharmacie. Voir par exemple l’emploi des plantes des pygmées où la remarquable élaboration de la médecine de l’Ayur-Veda de l’Inde. Le savoir-faire peut-être à l’origine d’une ingéniosité tout à fait considérable. Cela ne veut pas dire pourtant que les peuples qui ont élaboré ces techniques l'ont fait en l’absence de toute connaissance de la Nature. Une vision du monde très complexe sous-tend l’Ayur-Veda, une vision qui enveloppe une compréhension de la nature du corps et de sa relation avec l’univers. Mais, à la différence avec notre allopathie moderne, c’est qu’il ne s’agit pas d’une interprétation scientifique de la réalité, c'est-à-dire d’une représentation objective de la Nature. Dans la vision traditionnelle, la connaissance de la Nature est une compréhension qui passe par la voie de la subjectivité et qui considère la Nature com

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Vos commentaires

Questions:

1. L’histoire de la science occidentale n’est-elle pas précédée par celle des inventions techniques ?

2. La motivation du savoir pour le savoir peut-elle rendre raison du développement de la science en occident ?

3. Est-il concevable que dans une culture traditionnelle il y ait une pratique, dans une représentation ayant une portée explicative, même si elle n’a par une valeur scientifique ?

4. Faut-il considérer la connaissance des plantes chez des peuples traditionnels, comme au Mexique ou en Inde comme de simple pratique « sans science » ?

5. Comment comprendre l’interaction entre la technique et l’économie ?

6. Faut-il faire des motivations militaires une catégorie à part pour rendre compte du développement de la technique ?

7. L’ère du gadget n’est-elle symptomatique de l’esprit qui semble guider la technique ?

 

   © Philosophie et spiritualité, 2002, Serge Carfantan.
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