Le cinéma et la science fiction se sont appropriés depuis bien longtemps l’hypothèse d’une vie dite « extraterrestre ». La récurrence de ce thème est expliquée par des psychologues en disant que nous aurions dans la postmodernité répliqué en quelque sorte le mythe du nouveau monde des hommes du XVII ème siècle découvrant des continents insoupçonnés. Le mythe des extraterrestres serait un avatar de l’inconscient collectif de notre époque. Une autre forme de réduction psychologique consiste à voir dans ce thème une forme de compensation propre à une crise de la conscience collective qui, ne parvenant pas à résoudre ses propres problèmes, tourne les yeux vers le ciel en espérant qu’un miracle va se produire, que des petits hommes verts vont débarquer pour sauver la Terre. Il faut dire que la littérature fleurit sur le sujet et qu’elle nourrit effectivement tous les fantasmes.
La saine raison voudrait que l’on s’occupe avant tout des « intra-terrestres » et que l’on ne perde pas son temps avec des « extra » qui ne sont que le fruit d’imaginations bouillonnantes. Il vaut mieux porter un regard lucide sur la Terre que de rêver les yeux ouverts. Ce qui justifie amplement que ce genre de question puisse être écartée. Que l’homme apprenne déjà à marcher sur Terre avant de se prendre les pieds dans des spéculations floues! De fait, devant une telle confusion, la réaction des philosophes est de se moquer ou d’ignorer. Cette position est claire, et parfaitement justifiée.
Cependant, cela ne nous empêche pas de tenter de poser le problème philosophiquement de manière précise. Nous y gagnerons beaucoup, ne serait-ce que de comprendre à partir de quelles conditions il peut apparaître. Est-il rationnel d’admettre l’existence de la vie ailleurs que sur la planète Terre ? La réponse n’est pas simple et se contenter de l’éviter n’est pas satisfaisant. Notre propos ici sera donc réduit. Nous avons vu plus haut que la rationalité scientifique ne devait pas être considérée de manière dogmatique. La raison n’est ni une doctrine, ni une idéologie et moins encore une religion. Nous savons que toute explication scientifique de l’univers doit être encadrée dans la formule : « dans l’état actuel de notre savoir, nous pouvons dire que ». Il est parfaitement possible de conduire une réflexion sur la vie dans l’univers, sans supposer par avance toute une série de croyances.
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Un point de départ très intéressant nous est donné par un physicien italien, Enrico Fermi, prix Nobel de physique en 1938, célèbre aussi pour avoir produit la première réaction nucléaire en chaîne en 1944. Durant l’été 1950, Fermi travaillait au laboratoire de Los Alamos. En se rendant au restaurant, il discutait d’un dessin humoristique du New Yorker. Suite à une série de vols de poubelles, le dessinateur s’était amusé à représenter une soucoupe volante posée sur une autre planète avec des petites hommes verts portant chacun un container de déchets. Fermi demanda alors à Edward Telle, le père de la bombe H, une estimation de la probabilité que dans les dix ans à venir, nous aurions la preuve de l’existence d’objets se déplaçant plus vite que la lumière. Il présupposait bien sûr que les visiteurs se déplaçant pour nous voir, devraient avoir découvert un mode de propulsion supraluminique. Teller avança le chiffre 1sur 1 million. Fermi répondit que le chiffre était bien trop faible, et que son estimation se portait plutôt à 10%. La discussion se tassa un peu et tout d’un coup, Fermi se leva de table, et lança dans le fou-rire général de la cantine : « Mais où sont-ils ? » !! Par la suite, l’astronome Carl Sagan, baptisa la question « le paradoxe de Fermi ». (texte)
1) Le point de départ, c’est v la vitesse de déplacement d’un vaisseau spatial. Dans l’état actuel de notre savoir en physique, nous ne pouvons admettre qu’une propulsion de
v = 1% de c, la vitesse de la lumière.
En supposant des nefs d’une taille colossale, avec une haute maîtrise de la technologie, on peut penser qu’une civilisation A peut se déplacer et mettons 500 ans plus tard, atteindre les plus grosses planètes de leur propre système solaire. Ils s’y installent durablement. 500 ans plus tard, les voilà qui repartent vers d’autres mondes à coloniser de la même manière. Les 500 années d’installation s’ajoutent donc aux 500 années de voyage et donnent la vitesse de colonisation :
Soit 1% /2 = 0,5 %.
Etant donné que notre galaxie fait au minimum 100.000 années lumière de diamètre, il faudrait donc pour la parcourir :
100 000 x 0,5% = 20 000 0000 d'années.
Etant donné que les étoiles les plus anciennes ont un milliard d'années, si au début de l'existence de notre galaxie une civilisation avait décidé de la coloniser, elle devrait être partout maintenant. D’où la question de Fermi : « mais où sont-ils ? ». Nous n’avons pas de trace de leur existence.
Donc, conclusion, nous sommes seuls dans le cosmos. CQFD.
Précisons
que cette analyse n’est pas de Fermi lui-même. C’est plutôt une sorte d’exercice
de
physicien. Comme toute démonstration, elle se développe en admettant des
présupposés ; pour être précis, nous devons dire, une série d’hypothèses
dont la validité sous-tend la pertinence du raisonnement. Si nous étudions de
près les arguments ci-dessus, nous trouverons ceci :
H1 : On admettra qu’il est technologiquement impossible qu’un vaisseau spatial puisse se propulser à une vitesse approchant celle de la lumière.
H2 : On admettra qu’il faille restreindre le champ d’application spatial de l’argumentation volontairement aux limites de notre galaxie. Or il est raisonnable de penser que l’univers comporte entre 50 et 125 milliards de galaxies. La plus proche de nous est la M31 d’Andromède, à la distance de 2.200.000 années lumière. A la vitesse admise, il faudrait 220 millions d’années pour y faire un saut.
H3 : On admettra implicitement ou bien, au sens fort, a) que la vie est une denrée extrêmement rare dans l’univers. Ou bien au sens faible b) que la rareté concerne uniquement les formes de vie capables d’évoluer vers une structure vivante consciente et intelligente. Nous avons là tout le pan biologique du problème.
H4 : On admettra qu’il est nécessaire de raisonner de manière anthropomorphique concernant les modalités de comportement de A. La civilisation A est supposée colonialiste et impérialiste.
H5 : On admettra que le concept de civilisation galactique doit être pensé par analogie (R)
avec celui de civilisation humaine, ce qui suppose une forme de culture spécifique.H6 : On admettra qu’une civilisation puisse se maintenir identique 5 millions d’années.
H7 : On admettra que les motivations de colonisation de A puisse demeurer constantes durant 5 millions d’années, sans par exemple ne serait-ce que changer en volonté d’exploration ou d’installation entre temps.
2) Pour soutenir ces hypothèses, les scientifiques avancent que :
---------------H1 est choisi
dans une version paramétrée de manière faible, ce qui reste réaliste, eu égard à
nos connaissances actuelles. Avec 0,01 C on aurait déjà 11 millions de
kilomètres/heure. Cette vitesse permet d’atteindre Pluton en 3 semaines. C'est
beaucoup, mais c'est technologiquement réalisable. Partant de nos acquis, on
admettra qu’il peut existe des difficultés physiques aux voyages interstellaires
dont nous n'avons pas connaissance. Plus radicalement, autant dire qu’elles sont
peut être insurmontables et qu’il n’y a même pas de solution aux problèmes que
nous nous posons déjà. Ce qui liquide la question posée de manière élégante.
H2 est aussi paramétré à un niveau faible. Il est possible cependant de tenter de donner une formulation plus précise du nombre de civilisations analogues à la nôtre dans le périmètre de la voie lactée. On doit à Frank Drake l’équation suivante :
N = R x Fp x Ne x Fl x Fi x Fc x L.
Dans laquelle :
N est le nombre de civilisations.
R est le nombre d’étoiles naissant chaque année dans notre galaxie. R est proche de 1 mais sa valeur semble décroître avec le temps. Elle était proche de 5 il y a quelques milliards d’années.
Fp est la fraction d’étoiles qui possèdent un système planétaire. Le chiffre était inconnu jusqu’en 1996, date à laquelle les astronomes prouvèrent par le calcul l’existence de systèmes planétaires extra-solaires. Récemment, une planète extra-solaire de type jovienne a été photographiée.
Ne
est le nombre moyen de planètes analogues à la Terre.
Fl est le taux de planètes sur lesquelles une forme de vie a pu apparaître. La vie présente une tendance à se développer dès que les conditions le permettent et une planète tellurique n’est pas nécessaire. Ce terme serait donc proche de 1.
Fi est le taux de planètes sur lesquelles l’évolution pourrait engendrer une vie intelligente. C’est le paramètre le plus intéressant de la formule de Drake en terme de recherche scientifique, car il admet un lien direct entre la vie et l’intelligence.
Fc est le taux de planètes sur lesquelles une vie intelligente serait susceptible de développer des technologies de télécommunication avancées. Si des civilisations extraterrestres existent, on supposera qu’elles utilisent nécessairement la radio. D’où le lien avec le programme SETI.
L est la durée de vie moyenne d’une civilisation intelligente capable de communiquer à travers l’univers.
Au final, l'équation de Drake fournit un cadre de travail. Elle donne un nombre de civilisations possibles dans notre galaxie se situant entre 100 et plusieurs milliers. Or étant donné le nombre d'étoiles dans la Voie Lactée, nous aurions dû déjà rencontrer des civilisations extraterrestres. Le fait que cette rencontre ne se soit jamais produite donne à penser que nous sommes la seule espèce intelligente de la galaxie. Par extension on dira aussi dans l'univers. Beaucoup de scientifiques trouvent pertinent le résultat
N=1.H3 : La biologie mécaniste contemporaine soutient que la vie est apparue à partir d’un hasard extraordinaire sur la Terre. Il est quasiment impossible que le phénomène ait pu se reproduire ailleurs, compte tenu de ce que nous savons aujourd’hui. Jacques Monod, dans Le hasard et la Nécessité n’hésitait pas à dire que nous sommes exilés dans le cosmos, sur un bout de Terre, comme des Tziganes errants sur un territoire vide et hostile. Le paradigme actuel de la biologie exclut radicalement la possibilité d’une vie ailleurs dans l’univers.
H4 : Etant donnée que notre histoire est une bonne illustration du principe de Darwin, struggle for life, étant donné que celui-ci est, d’après le consensus actuel largement admis par les biologistes, nous avons de bonnes raisons de penser qu’il doit aussi en être de même pour d’autres civilisations. D’ailleurs cette idée a été largement reprise dans la science fiction : l’extraterrestre doit, soit en raison de son développement démographique excessif, soit en raison de la menace d’extinction de sa planète liée à l’absorption de son soleil, en venir à migrer. Même s’il ne faisait qu’explorer son espace environnement, il n’aurait en vue que sa conquête expansionniste, comme les conquistador de Cortès. Voyez La Guerre des Mondes de H.G. Wells. Mais il peut aussi très bien échouer en cours de route.
H5 : Une espèce tend à vouloir maintenir son identité. Le fait qu’elle soit intelligente ne change rien à ce postulat biologique. La culture est l’identité d’une civilisation. Le développement technologique est nécessaire et implacable certes, mais il ne change pas la structure d’une société qui reste fondée sur sa culture. Tout au plus, on admettra que le voyage dans l’espace aboutira à une unification forcée de l’identité des membres d’une même planète. Ce qui risque d’être très lent et conflictuel.
H6 : Dans la mesure où le problème de la survie à long terme est résolu par le voyage stellaire, l’identité d’une civilisation cherchera à se conserver dans le temps. Il faudrait toutefois qu’elle puisse surmonter les risques attenants à ses tendances autodestructrices, tels que ceux que l’on trouve dans les cultures humaines. Si nous n’avons pas pu établir de contact, c’est probablement parce que le taux d'autodestruction des civilisations serait bien plus fort que prévu. Dans ce cas, beaucoup de civilisations disparaîtraient avant d’avoir pu coloniser des régions éloignées de leur berceau originel, ou de pouvoir communiquer avec nous.
H7 : La seule survie poussera à conserver intacte la motivation conquérante. Sur une période aussi longue, les progrès technologiques fourniront des moyens de plus en plus sophistiqués, ce qui ne peut qu’alimenter l’expansionnisme inné d’une civilisation. On peut aussi compter sur les prouesses de l’évolution biologique pour assurer la survie des plus aptes sur une durée aussi colossale. Cependant, il faut encore compter sur les accidents cosmiques pour éliminer les tentatives de la vie.
En bref, si ces hypothèses sont fondées, en y ajoutant la nullité des résultats obtenus par le programme SETI, on peut accréditer la pertinence des interprétations qui versent dans le psychologisme. Les extraterrestres seraient à tout prendre une sorte d'hallucination. Un mythe postmoderne, le mythe d'une société qui commence à sentir l'angoisse de sa propre survie et compense dans l'imaginaire sa propre perpétuation.
Il y a encore des gens pour croire qu’une hypothèse scientifique peut apparaître par une sorte de génération spontanée, sans aucun présupposé, sans un terrain sur lequel elle aurait pu fleurir. A ceux-là il faut demander de s’informer sérieusement sur l’histoire des sciences pour enfin comprendre qu’il y a toujours eu un terreau dans lequel apparaissent les idées. Nous avons vu ailleurs sur l’exemple de Newton à quel point une physique est intimement liée à des convictions religieuses, philosophiques, ou même aux croyances d’une époque. Il ne faut jamais oublier que la science est une activité qui reste humaine et profondément sociale. Kuhn l’a bien montré. Les hypothèses ci-dessus peuvent et doivent être passées au crible de la critique.
1) Revenons sur les hypothèses précédentes:
H1 est un argument qui contient une étrange pétition de principe. Comment, à partir de notre technologie actuelle, fondée sur une propulsion thermique, formuler la moindre inférence sérieuse sur le futur ? L’argument est tout de même assez gonflé et en totale contradiction avec l’histoire des sciences et des techniques. Songeons à la loi de Moore en informatique. Il est raisonnable de penser qu’il pourrait fort bien exister des systèmes de propulsion bien plus rapides que ceux que nous possédons aujourd’hui. Il y a, dans les aperçus offert par la physique quantique, en matière d’énergie du vide, des plis de l’espace-temps, assez de suggestions pour que l’on puisse supposer dans l’avenir une dépassement colossal de nos technologies actuelles. En vertu de quoi notre ignorance actuelle pourrait-elle fixer les limites du possible ? A partir du moment où nous raisonnons sur l’hypothèse de civilisations différentes de la nôtre, il faut prendre en compte a) à la fois qu’elles peuvent être plus jeunes que la nôtre, moins avancées techniquement que nous, b) mais aussi qu’elles peuvent être plus âgées et beaucoup plus avancées que nous. Dans cette perspective, H1 est logiquement nul et non-avenu.
H2. L’autolimitation est tout à fait justifiée, cependant, là encore, elle ne tient qu’à nos structures technologiques actuelles. A supposer que celles-ci puissent être dépassées de très loin, l’argument ne tient plus. Or, toute réflexion solide sur la question posée doit précisément admettre le paramètre de possibilités technologiques supérieures aux nôtres, sinon, ce n’est tout simplement pas la peine de la poser, ce serait faire les choses à moitié, sans aucune cohérence avec le problème posé. Il est nécessaire de prendre en compte un nombre de civilisations bien plus important que ne le prévoit le calcul le plus optimiste de l’équation de Drake. A ne compter que 50 milliards de galaxies, cela fera déjà pas mal de beau monde, dans pas mal de Mondes. Difficile de croire qu’une civilisation très avancée ne serait pas capable de franchir les espaces entre les étoiles. (texte)
---------------H3. A supposer
que l’hypothèse du hasard à l’origine de la vie ne soit qu’une forme d’ignorance
déguisée en feinte modestie, doublée de rhétorique existentielle dépassée, le
château de cartes s’effondrerait. Or le dossier à charge à ce sujet est si
énorme, que l’on peut se demander si ce n’est pas qu’une croyance qui ne tient
plus que par l’inertie de l’enseignement de la biologie. Qui peut encore adhérer
aujourd’hui aux thèses du Hasard et de la nécessité ? Nous avons vu ce
problème. Aller au-delà de l’hypothèse du hasard comme origine est
indispensable. (texte)
H4.
Indéniablement, le propre d’une civilisation primitive est de se fonder
socialement sur le principe de la « lutte pour la vie ». Il faut se demander si
ce darwinisme primitif ne date pas un peu et s’il ne doit pas être sérieusement
révisé dans le problème posé. Seule une civilisation primitive aurait
l’idée de saccager sa planète, de menacer d’extinction la totalité des espèces
vivantes qui s’y trouvent, d’empoisonner son atmosphère et de mesurer la paix à
une menace de la bombe atomique. Une civilisation réellement évoluée
ne ferait certainement pas des choix aussi stupides. Elle aurait dépassé depuis
des lustres le concept de « lutte pour la vie ». Aller au-delà des principes
darwiniens est indispensable.
Le paradoxe de Fermi –par principe- nous demande de mettre entre parenthèses notre anthropomorphisme spontané et de cesser de partir de notre modèle actuel pour penser une civilisation différente. Cette leçon, nous l’avons déjà apprise en ethnologie, mais ici l’exercice est encore plus amusant, car il consiste à imaginer que le primitif c’est nous ! C’est bien ce qui est intéressant dans cette question. Supposer par avance que toute civilisation est par nature colonialiste et impérialiste est une sottise ou le reflet de préjugés d’une époque (les années 1950 le contexte de la guerre froide explique pas mal de choses). Ou les deux à la fois. Aller au-delà de l’ethnocentrisme est indispensable.
H5. Dans le même registre, une forme de vie hautement intelligente veut-elle dire occidental-catholique-consommateur-techno-scientifique… que sais-je encore ? Est-il vraiment certain que toute civilisation prendrait durablement et nécessairement une orientation technologique ? Rien n’est moins sûr. Voyez l’argument de La Belle verte.
H6. Il est aberrant, en partant du concept de civilisation qui est le nôtre, de penser qu’une civilisation A pourrait rester identique 5 millions d’années de suite. Ce serait nier le devenir et son action. En conséquence, il ne devrait plus y avoir grand-chose en commun entre A à t0, et A1, 10.000 ans plus tard, A2, 50.000 plus tard, A3 250.000 plus tard etc. Même en escomptant une avancée technologique considérable, on n’arrête pas le changement, on ne peut arrêter le temps. Sur une très longue distance, le voyage ne vaut vraiment la peine que s’il est très rapide. Sur une très courte distance -un comptoir sur une planète voisine- il n’a d’intérêt qu’en cas de destruction de la planète mère. Les deux figures sont différentes. Si le colonisateur cherche une solution à un problème de survie, il ne le fera qu’à court terme et certainement pas pour 80 générations à venir. Il cherchera d’abord une solution en local. Bref, la logique exponentielle de Fermi ne tient pas la route. Et elle est d’une lourdeur sociologique évidente.
H7. La longueur des durées évoquées ne pose pas seulement un problème sociologique. Nous ne sommes plus ici dans le temps historique, nous sommes dans le temps de l’évolution de la Nature, ce qui pose le problème des mutations possibles de l’espèce qui chercherait à essaimer ailleurs. La forme d’origine et celle adoptée posent encore un autre problème qui conduit éventuellement à une falsification du modèle de Darwin. Celui-ci stipule que des conditions de vie différentes devraient nécessairement donner des espèces différentes. Si jamais l’évolution d’une forme de vie non-terrestre aboutissait à des formes humanoïdes, cela sonnerait le glas du darwinisme. De toute manière, la motivation conquérante et l’idée même d’expansionnisme n’ont de sens qu’à partir d’un modèle de civilisation essentiellement humain.
2) Oui, mais lequel ? Il amusant de remarquer que Fermi et ses collègues ont révisé
N de manière pessimiste au gré des événements de l’actualité. En clair, même en partant d’un raisonnement mathématique et physique, nous ne pouvons pas éviter une forme d’anthropocentrisme consistant à puiser l’idée de civilisation dans celle que nous avons sous les yeux. Ce qu’il faudrait précisément éviter.On pourrait penser que ces critiques balayent d’un revers de main l’intérêt du paradoxe de Fermi, mais il n’en n’est rien. Le paradoxe de Fermi nous met devant une question proprement philosophique, celle de savoir en quoi pourrait consister une civilisation avancée, différente de la nôtre. Et la question n’est pas vraiment nouvelle. Elle tient à la représentation de l’univers qui est la nôtre. Ouverte ou fermée. Dans l’ancienne astronomie indienne, jyotish, il y avait déjà l’idée de système planétaire en mouvement autour du soleil. Les spécialistes ont d’ailleurs été étonnés de remarquer que la datation de l’âge de la Terre est étrangement semblable à celle que nous donnons aujourd’hui. C’est encore aujourd’hui cette datation qui sert de base à l’élaboration d’un thème astrologique dans le système de jyotish. L’idée de pluralité des mondes était déjà présente. En Grèce, l’école atomiste admettait un système analogue aux nôtre, composé d’une Terre, de planètes et d’une étoile fixe. Epicure disait que l’on ne saurait concevoir un champ de blé avec une seule tige et donc que d’autres mondes comme le nôtre devaient exister. Aristarque de Samos partageait l’idée d’héliocentrisme, bien avant que cette hypothèse ne fasse scandale dans l’Occident chrétien, pour mener au procès de Galilée.
La domination du géocentrisme au Moyen Age tient à la conjugaison de deux facteurs : la reprise du modèle du cosmos d’Aristote dans l’astronomie de Ptolémée et l’attachement dogmatique de la doctrine chrétienne à l’idée que la Nature a été donnée par Dieu à l’homme en partage et que l’homme en est le centre. Saint Augustin croyait que nous sommes seuls. Saint Thomas d’Aquin posait explicitement que si d’autres mondes existaient, cela mettrait en doute la perfection divine. Il ne devait exister qu’un seul monde. L’hypothèse de la pluralité des mondes était perçue comme menaçante pour l’Eglise. C’est une des raisons, pour lesquelles Giordano Bruno fut brûlé par l’Inquisition sur la place Campo di Fiori à Rome, car il soutenait ouvertement qu’il existait une infinité de mondes. Nous avons vu que Bruno admettait aussi une autre hypothèse dangereuse pour l’Eglise, celle de la renaissance.
Alexandre
Koyré a démontré magistralement que cette vision éclate à la modernité, comme on
peut le voir dans les Pensées de Pascal. Le paradigme astronomique
bascule de l’idée d’un cosmos limité à l’idée d’un univers infini. Pascal fait
sentir le vertige de l’illimité quand il entrevoit qu’il pourrait y avoir autant
de mondes dans l’infiniment petit que dans l’infiniment grand. Dans l’hypothèse
de Copernic, notre position dans l’univers ne peut pas être exceptionnelle.
D’autre part, de Galilée à Newton la science moderne va montrer que les lois
physiques sont les mêmes partout. Dans ces conditions, à moins de conserver une
position idéologique du géocentrisme, on ne voit vraiment pas pourquoi la
planète Terre serait une exception dans l’univers. Le géocentrisme a produit
suffisamment d’erreurs dans l’histoire pour que nous puissions tirer un trait
dessus, la science est désormais copernicienne. Le tout est de savoir si nous
avons assez d’audace pour aller jusqu’au bout de ses conséquences. (texte) Les Lumières
ont tracé la voie. Fontenelle en 1686 badine avec une marquise dans ses
Conversations sur la Pluralité des Mondes, mais il prend aussi son sujet au
sérieux pour aller aussi loin que le peut son imagination. (texte) Désormais, le thème
des civilisations extra-terrestres s’installera définitivement dans la
littérature pour produire un genre, celui de la science-fiction. On peut rendre
hommage à la science-fiction sur ce point, elle a ouvert notre imagination à des
possibles que nous ne pouvions entrevoir sous le règne du géocentrisme. Nous
sommes sortis de notre nombrilisme et c’est pourquoi il nous est devenu très
difficile d’admettre que nous serions seuls dans l’univers. Un renversement
singulier s’est produit : si autrefois on ne pouvait avancer qu’avec difficulté
la croyance dans l’hypothèse de la pluralité des mondes ; aujourd’hui, c’est
l’idée que nous serions seuls dans l’univers qui nous paraît relever d’une croyance
(document).
Bien sûr en amont, il n’y a plus le Dogme (quoique ?!), mais il est tout à fait
possible d’y trouver l’idéologie.
Le débat idéologique qui opposait autrefois les partisans du géocentrisme et ceux du système de Copernic se retrouve aujourd’hui, mais cette fois-ci déplacé du concept de monde, vers celui de l’univers. Le Dogme de l’Eglise voulait ramener le centre de l’univers à la Terre. La nouvelle astronomie découvrait l’immensité de l’univers et considérait la Terre comme une planète parmi d’autres, tournant autour d’une étoile, le soleil. Curieusement, le géocentrisme renaît aujourd’hui dans l’opinion selon laquelle, la Terre serait la seule planète abritant la vie, une exception improbable dans un univers aussi colossal que stupide. Ce type de déclaration sonne en écho de déclarations telles que celles de Claude Bernard disant que la vie n’est qu’un ensemble de fonctions qui résistent à la mort. Etrange. La loi de l’univers est la mort. C’est la science qui l’affirme et il faut la croire. C’est un peu comme si une nouvelle dogmatique avait pris le relais de celle de l’Eglise. L’interprétation de la physique comme un Dogme s’appelle matérialisme. C’est ce présupposé qui conditionne la solution commune du paradoxe de Fermi. La faiblesse principale de son paradigme est de raisonner à partir du concept d’évolution de la technologie, sans prendre en compte une évolution simultanée de la conscience. Il puise son modèle de développement de la conscience collective dans son époque. Plus radicalement, il fait l’impasse, par principe sur une possibilité énorme : et si l’univers était par nature vivant ?
1) Nous
avons remarqué plus haut l’étrangeté de l’opposition
entre l’homme et la Nature que Pascal propose dans les Pensées. Chez
Pascal se rencontre à la fois la vision moderne d’un effroi devant
l’univers infini, mais aussi la vision chrétienne d’un dieu
transcendant.
(R) Le Dieu de Pascal est un dieu caché. Le christianisme admet que Dieu est
transcendant à sa création. Il l’a propulsée à partir du néant, mais ce n’est
qu’une énorme machine qui suit mécaniquement son cours. Dieu pourrait lui
retirer toute impulsion et dans ce cas, l’Univers retomberait dans ce néant
au-dessus duquel il est de toute manière toujours suspendu. La création est
en dehors de Dieu, car elle est marquée par le
péché originel. Elle n’est pas vraiment
vivante. L’univers est muet et inconscient. Seul l’homme est doué de
langage et de conscience. Pascal fait l’éloge de la pensée en l’homme sur
l’arrière-fond d’une conception de l’univers orientée vers le matérialisme. Dans
ce contexte, l’infinité de l’univers, c’est
surtout l’infinité du vide
et la pluralité des mondes n’a finalement pas grand sens. Tout à l’inverse, dans
une représentation où la Vie absolue est immanente
à l’univers, l’infinité de l’espace, l’expansion de l’univers, la pluralité des
mondes, prennent un tout autre sens. Celui que lui donne l’animisme.
Nous n’allons pas sur ce point reprendre dans le détail l’itinéraire de Rupert
Sheldrake dans L’âme de la Nature. Il faut lire ce texte en entier pour
comprendre ce qui va suivre.
Ce que Sheldrake montre brillamment en suivant l’itinéraire de la représentation de la Nature en occident, c’est que nous sommes aujourd’hui en train de redécouvrir que l’univers possède une puissance créatrice capable de s’auto-déterminer, en bref, l’univers est un être vivant. Ce changement radical du paradigme de la Nature a des implications qui retournent de fond en comble la vision réductionniste de la modernité. Nous faisons nos premiers pas sur une Terre que nous savons maintenant vivante, mais ces pas dans lesquels nous nous engageons, nous engagent sur un sentier ancien. Les traditions spirituelles de l’humanité n’ont jamais ignoré que l’homme marchait sur une Terre sacrée, car précisément, c’est la reconnaissance du Sacré qui seule permet d’entrevoir le jeu infini de la Vie dans l’univers. La Vie n’est pas quelque chose qui viendrait se surajouter après coup, à une réalité morte. Il n’y a pas de dualité infranchissable entre la Vie et l’univers. La Vie est involuée aux premiers instants de l’univers et évoluée dans son processus séquentiel de développement. Il n’est pas tout à fait exact de dire que seul le Principe Anthropique Cosmologique (texte) permet de rendre compte du développement du cosmos. Le principe anthropique introduit une finalité conduisant à l’homme. Il faudrait plutôt dire que l’univers manifeste l’expansion d’une intelligence créatrice infinie dont l’homme est un représentant parmi d’autres et non le seul. La civilisation humaine est la seule manifestation avancée de l’intelligence de l’univers que nous connaissions assez bien. Il serait prétentieux de dire qu’elle est la seule civilisation possible. Il est plus rationnel d’admettre que le jeu de l’évolution fleurit dans une diversité de mondes, comme il a pu s’épanouir dans une diversité d’espèces sur notre planète. Kant, dans ses écrits sur l’Histoire disait que la Nature a très intelligemment placé les hommes dans des conditions très variées sur la Terre, ce qui a donné naissance à un développement de potentialités de cultures très diverses. La même remarque vaut surmultipliée à l’échelle de l’univers. Les distances effroyables entre les étoiles, la multitude des niches évolutives sur des planètes favorables, autorisent un développement intelligent distinct et une échelle d’évolution séparée. Par conséquent, l’idée de civilisations très jeunes et très âgées dans les recoins de l’univers a tout à fait un sens. Un univers infini veut dire une infinité de possibles, un jeu infini de l’identité dans la différence. Bien sûr, cette possibilité n’est pas facile à recevoir. Elle porte un coup sévère à une idée que nous ne savons pas encore lâcher : celle de la hiérarchie et de la supériorité qui installerait un seul modèle, le nôtre, sur la première marche du podium de l’évolution. Elle nous oblige aussi a regarder en face ce que nous ne voulons pas voir : que notre civilisation est à bien des égards encore très primitive. Et ce n’est même pas une insulte. C’est un fait que tout esprit un tant soit peu lucide peut reconnaître. Admettons par hypothèse que nous ne sommes encore qu’à la maternelle de notre évolution collective et nous serons certainement plus près de la vérité.
2) Le fil conducteur qui permet de penser la transformation du vivant est l’évolution biologique dans le sens de la différentiation et de la complexité croissante. Le fil conducteur qui permet de penser une civilisation intelligente, différente de celle que l’homme a pu élaborer, est l’évolution de la conscience. La conscience émerge lentement dans l’évolution d’une conscience vitale en direction d’une conscience mentale. L’univers est dans sa totalité un processus de Devenir et ce processus devient effectif là où le terrain matériel est favorable. Envisageant le processus évolutif, S. Aurobindo invoque un triple développement :
a) « En premier lieu, une évolution des formes de la matière organisée de façon de plus en plus subtile et complexe, de manière à laisser agir une organisation de conscience toujours plus grande et plus complexe, plus subtile et puissante, constitue le fondement physique indispensable». Au niveau de l’univers, cela implique la formation d’une exoplanète sur laquelle le vivant produira son auto-développement.
b) « Ensuite, un progrès évolutif ascendant de la conscience elle-même, de palier en palier, car telle est évidemment la spirale ou la courbe d’émergence que l’évolution doit décrire sur cette base ». Au niveau de l’univers, cela implique une complexification croissante du système nerveux permettant d’aboutir à une entité capable de manifester une conscience de soi. Il faut supposer à la fois un aboutissement proche de l’homme, selon une forme humanoïde, et aussi pouvant aboutir à une structure physique plus éloignée.
---------------c) « Enfin,
pour que l’évolution soit effective, le processus exige aussi que l’on absorbe
sur chaque palier, dès qu’on l’atteint, tout ce qui a déjà été évolué, et qu’on
le transforme plus ou moins complètement de manière à permettre un jeu
complètement nouveau de l’être et de toute la nature, une intégration ». Au
niveau de l’univers, l’apparition d’une entité intelligente impliquera une
synthèse de plus en plus élaborée de ce que permettent de produire les
potentialités de la conscience. Une fois la conscience de soi manifestée, le jeu
de l’Histoire accélère le temps et ouvre un espace à
l’élaboration d’une culture. L’accès à un développement technique et
ensuite technologique fait partie de ce parcours, mais aussi et avant tout le
développement impliquant un langage, une sociabilité à la fois en tant que
morale collective et mode de vie, une science, une forme de spiritualité, un art
créateur et un art de vivre impliquant des modes spécifiques de relation entre
l’homme et la nature. L’intégration progressive dans un tout harmonieux est une
aventure avec ses difficultés, ses aléas, ses possibilités d’impasse et
d’échecs, comme ses possibilités d’ouverture et d’accomplissement. Le nœud le
plus difficile, celui que nous affrontons sur la Terre aujourd’hui, est celui de
l’intégration du développement technologique. Une
civilisation dont l’avance technologique surpasse son aptitude à la gérer de
manière sage et intelligente est dans le plus grand des périls. Elle doit
à un moment se trouver confrontée à la
possibilité
de son auto-destruction, jusqu’à l’annihilation éventuelle de son berceau
évolutif, ou bien provoquer en elle-même une mutation de conscience suffisamment
radicale pour ouvrir un futur respirant dans une gloire plus élevée. Il est
possible que la Terre ait dans le passé atteint ce point à travers certaines
civilisations aujourd’hui disparues. Il est probable que ce nœud évolutif ait
été rencontré ailleurs dans le cosmos, avec ses deux formes de résolutions :
destruction ou métamorphose. Il est tout aussi probable que la contradiction ait
été complètement surmontée dans des civilisations ayant atteint un degré d’unité
suffisamment élevé pour que l’expansion de la conscience l’emporte finalement et
qu’elles aient pu produire un modèle reflétant une sagesse et une unité avec le
cosmos, dont nous n’avons pour l’instant pas la moindre idée.
Dans une échelle de temps très vaste, il est tout à fait raisonnable de penser que d’autres civilisations ailleurs dans le cosmos ont très bien pu, sur la base d’une connaissance plus complexe, bâtir un monde différent du nôtre. Le seul fait qu’un peuple puisse surmonter la représentation fragmentaire d’un individualisme frénétique et devenir conscient de son unité avec l’univers, laisse place à une évolution sans limite.
On peut supposer dans ce cas que son premier soin sera de prendre soin de sa planète mère, au point d’aboutir à une symbiose élevée avec son milieu et à un contrôle assez fin de son environnement naturel. Contrairement à ce que disent les auteurs de science fiction, dans cette direction, il est logique de penser qu’une civilisation avancée accordera une importance très élevée à ce que nous considérons comme négligeable aujourd’hui sur Terre : la qualité de la vie. Une civilisation très évoluée veut dire une qualité de la vie très élevée. Elle sera certainement plus proche de la nature que nous ne le sommes. Elle ne mesurera certainement pas son avancement à l’aune du quantitatif, dans une accumulation d’objets inutiles, une vie artificielle et névrotique, le saccage et le pillage des ressources naturelles. Le privilège du raisonnement quantitatif est la marque de notre postmodernité, de notre société de consommation, marque d’une civilisation encore très primitive. Auquel cas, notre propre évolution signifie aussi à terme le dépassement du modèle postmoderne et l’invention d’un nouveau paradigme de civilisation. (document) De là suit que, si le développement de la conscience est indispensable, par contre l’hyperdéveloppement technologique n’a rien d’évident en soi. Il serait plus cohérent de penser qu’une entité intelligente développerait ses pouvoirs psychiques, son aptitude à l’empathie, plutôt que de multiplier indéfiniment des prothèses technologiques, au dépend du développement perceptif, mental et spirituel. (document) Plus on déporte vers la machine nos aptitudes et plus nos facultés s’atrophient. Si nous laissons notre cerveau en friche, nos sens engourdis, et remisons notre âme au placard, nous ne risquons pas de nous développer beaucoup. Voyez sur ce point ce que Satprem a écrit à ce sujet. Alors, franchement de ce côté, il y a des arguments qui portent peu. On s’attend dans le programme SETI à découvrir des ondes radio près des étoiles. Mais dans un siècle ou deux, est-ce que nous nous en servirons encore pour communiquer ?
Nous avons
vu pour commencer l’argument de l’absence « de trace d’existence » d’une
intelligence extraterrestre, d’où l’on infère que nous sommes seuls dans
l’univers. En l’apparence, il est très convaincant, car les preuves ne sont pas
là. Cependant, à la lumière de ce que nous venons d’exposer, l’argument vaut
peu. Il y a une bonne blague dans Calvin et Hobbes
à ce sujet : « La meilleure preuve qu'il existe des êtres intelligents dans
l'univers, c'est qu'aucun ne soit venu nous
rendre visite" ! Laissons de côté
l’argument moqueur (qui est dans La Belle Verte), « on viendra dans un,
siècle ou deux, quand ils seront plus évolués !». Sous-entendu : « pour
l’instant, au stade où vous en êtes, collectivement, vous n’êtes pas prêt à ce
type de communication ». Le plus important, c’est certainement que du point de
vue d’une civilisation très avancée, il paraîtra certainement souhaitable de ne
pas empiéter sur le libre-arbitre
d’une autre civilisation et d’interférer avec son évolution. La sagesse de la
conscience de l’unité invite à respecter cette règle. Elle a été mille fois
répétée dans les traditions spirituelles. Aurobindo en faisait la recommandation
explicite dans la relation à autrui. Au niveau du cosmos, elle garde tout son
sens. Une Rencontre du Troisième type, si elle était officielle, aurait
un impact prodigieux sur la conscience collective, ce
serait une commotion historique d’une telle ampleur qu’aucun dirigeant de la
planète ne serait prêt à l’assumer. Il y a contradiction entre le désir de
communiquer avec d’autres intelligences dans l’univers et l’incapacité de
pouvoir assumer publiquement une communication si elle se produisait. Le statut
quo entre d’un côté un programme de recherche comme SETI et de l’autre
l’affirmation réitérée de l’inexistence de la vie extraterrestre dans l’univers
arrange tout le monde. Cela permet de ranger le concept d’OVNI dans l’univers du
cinéma, de la science fiction et de parler de mythologie postmoderne. Même si on
peut toujours avoir des doutes sérieux. A force d’entretenir dans l’opinion
commune que tout n’est qu’hallucination, manipulation et trucage, le public
finit par se dire qu’il pourrait tout aussi bien y avoir trucage et manipulation
dans la volonté de dissimuler des faits. C’est de bonne guerre dans la
désinformation. D’où le mot de
Jacques Bergier : les OVNIs sont des
hallucinations collectives… provoquées par des extraterrestres ! ! Quitte à être
sceptique, soyons-le d’un côté comme de l’autre,
suspendons la créance, mais gardons l’esprit ouvert. Le prétendu
sceptique qui
partage entièrement les vues dogmatiques d’une science limitée en fait ne doute
de rien ! Le sceptique qui ne rejette que les conclusions de la science physique
et partage n’importe quelle croyance allumée ne doute de rien non plus.
* *
*
Il est tout à fait rationnel d’admettre l’existence d’une vie extraterrestre et si nous y pensons sérieusement, c’est même une opportunité d’ouverture d’esprit magnifique qui ne devrait pas être découragée par avance. C’est un bon entraînement pour apprendre à se distancier de notre identification ethnocentrique et de nos modèles culturels actuels. C’est un bon exercice pour donner à la pensée une position plus logique, impersonnelle, impartiale. Le sublime de la contemplation nocturne des étoiles a son pendant dans l’ouverture de l’esprit à l’infini. C’est un élément nécessaire pour entrer dans la logique de l’infini. Nous ne devrions pas nous moquer de ceux qui ont cette ouverture, même si elle prend parfois des allures assez folkloriques. C’est une invitation à respecter toute vie dans l’univers et à marcher sur Terre dans la présence du Sacré en pensant que l’inconnu est ouvert et que nous devons rester ouvert à l’inconnu.
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© Philosophie et spiritualité, 2006, Serge Carfantan,
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