Leçon 7.   Les formes de l’illusion    english flag    pdf téléchargement     Téléchargement du dossier de la teçon

    Nous sentons bien que l’illusion constitue un danger. L’illusion inquiète. Elle nous menace sous la forme d’une déception possible, d'une souffrance ou d'un déchirement. Nous savons peu de choses sur l'illusion, mais nous savons ce qu’elle représente quand elle vient déchirer notre vie. Le plus souvent, nous confondons illusion avec l’erreur. Or, s’illusionner ce n’est pas seulement se tromper. L’erreur, une fois comprise, disparaît et laisse place à la connaissance vraie. L’illusion est par contre bien plus tenace. On a beau savoir, on peut toujours se laisser abuser. L'illusion possède un pouvoir de fascination qui fait qu'il est facile d'y croire et de se laisser entraîner par la représentation qu'elle nous suggère.

    L'illusion peut prendre plusieurs formes. Nous connaissons tous les illusions d'optique, comme celle du soleil qui grossit à l'horizon et diminue au zénith,  mais elles ne recoupent qu'une seule catégorie d'illusions, les illusions perceptives. Il nous faut classifier les formes d’illusions pour délimiter clairement leur action et voir sur quoi elles reposent. Il est possible pour cela de discerner trois grands domaines où nous les rencontrons : celui de la pensée collective et des illusions collectives, celui du rêve, celui des illusions individuelles de la perception de veille.

    Qu'est-ce que les différentes formes de l'illusion partagent en commun? Comment comprendre ce qu’est l’illusion à travers les formes qu’elle peut prendre ?

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A. Les illusions collectives

    Partons du cadre le plus large, celui de la conscience collective. Peut-on parler d’illusions collectives ? Ou bien faut-il réserver l'usage du terme illusion à des phénomènes strictement individuels? Il y a illusion quand une représentation vient à s'imposer à la conscience, alors que celle-ci ne renvoie à rien de réel. L’illusion est de l’ordre d’un simulacre plus vrai que nature. Dans la mesure où plusieurs sujets sont ensemble prêts à croire dans une représentation, il peut y avoir une illusion collective. Cela veut dire qu'alors plusieurs personnes seront prêtes à certifier la validité de l’interprétation d’un fait qui s’est déroulé sur le plan de la perception alors qu’ils ont tous ensemble été abusés, c'est-à-dire que la réalité n’est pas cette apparence qu’ils ont vue ensemble vers laquelle pourtant convergent leurs témoignages fondés sur les sens (consensus d'opinions). (texte) (exercice 4a)

    1) Un magicien vient faire un spectacle. On dit qu'un illusionniste fait une représentation. Ces mots sont bien choisis puisqu’il s’agit tout à fait d’une représentation, donc d’une présentation seconde (pour le public) par rapport à une présentation première (que seul connaît le magicien). On parle de prestidigitation, le prestige de ce que des mains habiles peuvent accomplir sans que personne ne le remarque. Manipulations adroites et parfaitement dissimulées aux yeux du public. Le tour de magie est appelé illusionnisme. Dans son essence, il consiste, par une mise en scène ingénieuse, à installer la croyance dans une représentation dans l’esprit de chacune des personnes du public. Une représentation qui soit telle, qu’il ne puisse que croire ce qu’il a vu, c'est-à-dire ce que l’on a voulu lui montrer. La jeune fille a été coupée en deux dans la boîte. Le lapin est sorti du chapeau. La corde s’élève toute seule en l’air. De nombreux spectateurs voient la même chose. Même l’appareil photo ne montre rien d’autre que ce qu’ils ont vu. Et pourtant, les choses ne se sont pas passées comme les spectateurs le croient. Il ne s’est rien passé de ce que tous ces gens ont pu croire. La jeune fille n’a pas été coupée en deux. Le lapin n’est pas apparu « comme par magie ». On dit qu’il y a un « truc », mais qu’il ne faut bien sûr pas révéler pour que la représentation garde sa puissance d’envoûtement. Donner le truc, c’est dévoiler la réalité, le processus réel de l’apparition du phénomène, tel qu’il a été soigneusement caché aux yeux du public. Il faut que la connaissance du public reste incomplète, qu’il n’ait que l’apparence. De cette manière se produit un effet : le public sent bien qu’il a été trompé, mais il reste sur sa faim en ignorant de quelle manière il est possible de produire pareil phénomène. Le phénomène a été vu, c'était criant de vérité, mais la logique

-------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------    ---------------L’illusion peut donc être illusion collective à chaque fois qu’une représentation recueille l’assentiment de témoignages concordants en sa faveur et que malgré cela, la réalité est toute différente de ce que les témoins ont ensemble pu affirmer. C’est assez troublant. Comment déterminer ce qui est « réel » ? Ce qui est « vrai » ? Est réel ce qui est tenu pour objectif et ce mot signifie dans notre expérience empirique « ce que plusieurs témoins peuvent constater ». Si la réalité est dans notre vigilance quotidienne soutenue par une expérience-en-commun et que celle-ci se révèle être illusoire, alors toute notre certitude empirique s’effondre. On peut concevoir que dans une expérience particulière, on puisse faire erreur, mais qu’il puisse y avoir une illusion collective pose de graves problèmes. Notre certitude empirique n’a pas d’assurance en dehors des témoignages convergents des sujets établis dans la veille or la représentation qui en résulte peut tout aussi bien parfois être une illusion. L’expérience est ici collective, et on peut très bien collectivement être abusé. Une fois la représentation terminée, les spectateurs se rendent compte qu’en fait, il ne s’est rien passé de ce qu’ils ont cru. Mais l’illusionniste n’est pas pour autant une charlatan. Le public est averti. Il sait bien que ce n’est que de l’illusion. Le charlatan lui se sert de l’illusion en voilant l’illusion en tant que telle. Il exploite la crédulité, l’adhésion naïve à l’illusion. Le produit miracle sensé guérir une pléiade de maladies n’est que du sucre et quelques herbes, mais les bonnes gens sur la place se laissent piéger par les boniments du charlatan.

    Comprenons bien le mécanisme. La représentation illusoire n’était rien d’autre qu’une création mentale de la conscience collective. L’esprit, l’organe interne du mental, possède la capacité de faire apparaître une existence qui n'a pas de réalité. Le mental pose à la fois les objets, comme extérieurs et réels, et il pose aussi les pensées, comme subjectives et intérieures. Objets et pensées apparaissent clairement dans l’expérience ordinaire, mais dans le cas présent ils n’existent pourtant que dans l’esprit des spectateurs. C’est une leçon d’importance car nous concevons par là que le pouvoir du mental est immense et que la conscience peut-être à tout instant le siège d'illusions. Nous comprenons aussi que nous ne pouvons pas entièrement nous fier à une perception si elle est de l'ordre d'une vision irréelle. (texte)

    2) On peut par là donc comprendre l’argument des athées à l’égard de tout ce qui est phénomènes religieux. Des croyants réunis dans un lieu saint sont tout disposés à croire. Leur ferveur les autorise à immédiatement adhérer à des signes, à ce qui pourrait être seulement un habile montage. Un fan-club d’OVNIS réuni au Nouveau Mexique pour son congrès annuel peut aussi être dans cette ferveur de la croyance qui le disposera à croire avoir vu telle ou telle chose, parce que là aussi, le désir peut anticiper sa réalisation. L’imagination peut collectivement se donner un objet. Un plaisantin qui monte une mise en scène lumineuse près du lieu d’observation verra s’extasier ces croyants du Nouvel Age. Cela s'appelle un canular ! Les conditions sont réunies pour une illusion collective.

    Les miracles et les apparitions mystérieuses pourraient dès lors être des illusions religieuses. Le doute en tout cas est permis, et il faudra prouver le contraire si ce n’était pas le cas. Il peut exister des illusions religieuses, là où des croyants sont à ce point plongés dans une foi fébrile qu’ils sont prêts à croire à toutes sortes de confirmations fantaisistes de leur foi. Ce qui est inquiétant en la matière, c'est quand une communauté religieuse semble prise d'une sorte d'ivresse de la vérité qu'elle dit posséder, car de l'illusion on bascule aisément dans le fanatisme et le sectarisme. Qu'est ce que le fanatisme après tout? Une foi devenue hallucinée. Une ivresse de la croyance qui veut se communiquer, y compris par la force. Le fanatisme est cette passion qui s'empare d'une communauté et qui fait de la fierté de la foi, un orgueil aveugle qui autorise la volonté d'imposer sa foi à autrui. Le fanatique, c'est exactement l'opposé de celui qui doute, il est persuadé être dans le vrai, comme le sceptique lui est persuadé qu'il ne peut

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    © Philosophie et spiritualité, 1996. 
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