Leçon 203      Pouvoir religieux et pouvoir politique    

    Traditionnellement on opposait pouvoir spirituel et pouvoir temporel. (texte) Le pouvoir spirituel  émanant de la puissance éternelle de Dieu était confondu avec le pouvoir religieux émanant de l’Église et incarné dans la personne d’une autorité comme le Pape.  L’expression pouvoir temporel De la religion à la spiritualitédésigne essentiellement le pouvoir politique souverain, pouvoir qui règne en effet dans le domaine du relatif gouverné par le temps.

    Or dans une leçon précédente nous avons marqué une distinction entre religion et spiritualité. Il nous est apparu que la religion doit avant tout être considérée comme une organisation. Les religions, qu’on le veuille ou non, fonctionnent dans la logique des institutions et elles participent directement du pouvoir temporel. Ce qui les différentie du pouvoir politique proprement dit, c’est le caractère « sacré » de l’autorité qu’elles revendiquent et qu’elles dénient au pouvoir « profane ».  Ainsi naît la dualité entre l’ordre religieux et l’ordre profane, dualité intensément conflictuelle comme l’Histoire nous le montre. Nous avons pris soin de montrer que la spiritualité réside dans une relation vivante, personnelle, non-duelle, de l’être humain à l’Esprit. L’aventure intérieure de la spiritualité n’est pas une affaire de pouvoir, d’organisation, de dogme ou de morale sociale.

    Toujours est il que nous sommes, entre religion et politique, à ce moment de l’Histoire à la croisée des chemins. Nous assistons partout à une montée des extrémismes religieux.  Dans quelle mesure pouvoir politique et pouvoir religieux peuvent-ils être réconciliés ? A-t-on seulement raison, d’opposer, comme on l’a fait si souvent, l’Église et l’État ? L’organisation religieuse n’est-elle pas la préfiguration de l’organisation étatique ? L’État n’a-t-il pas été considéré par Hegel comme le « dieu vivant » ? Ou bien ne faut-il pas à tout prix désacraliser l’État au nom de la raison humaine pour lui donner un sens ? Ce qui serait la seule manière de rendre possible sans heurt la coexistence des religions dans un même espace social.

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A. La montée aux extrêmes et la religion

    Jetons un regard sur notre époque. Personne ne sait exactement ce qu’a prophétisé André Malraux,  s’il faut retenir « Le XXIe siècle sera religieux ou ne sera pas », ou bien « Le XXIe siècle sera spirituel ou ne sera pas ». Nous avons vu précédemment que ce n’est pas du tout la même chose ; l’alternative elle-même entre ces deux directions est un des défis les plus graves de notre temps. Ou bien nous sommes capables d’ouvrir une ère de compréhension universelle dans laquelle la famille humaine saura dépasser toutes les divisions religieuses ; ou bien nous prenons la voie de la radicalisation des religions, dans un mouvement qui ne conduit pas l’humanité vers plus d’intégrité, mais vers davantage d’intégrisme.

     1) Le malheur, c’est que tout nous porte à croire que nous sommes bel et bien engagés dans la seconde direction. Il y a des conditions géopolitiques à connaître. Un fil conducteur au moins. Au cours du XX ème siècle, la politique menée par l’Occident s’est totalement convertie au dieu pétrole. C’est au dieu pétrole que nous devons l’essor du capitalisme et de notre société de consommation, l’american way of life. La propagande publicitaire a véhiculée l’image d’une société d’opulence, mais dont la richesse dépend d’une énergie fossile d’un coût très, très faible et des sous-produits de l’or noir (des engrais, des solvants, tous les plastiques et l’énorme pétrochimie qui va avec). Très peu de gens en ont conscience, mais la fin du pétrole sonnera le glas de la société de consommation. Dans l’euphorie consumériste des trente glorieuses, on croyait dans le rêve de ressources inépuisables et d'une productivité à l’infini. Aux USA en 1900 il suffisait d’une pelle et de quelques barriques pour récolter la pâte noire du pétrole en surface. Idem en Russie près de Bakou. Une époque jubilatoire, tant les promesses de l’or noir étaient merveilleuses pour les adolescents qui se pavanaient au volant des grosses cylindrées des années 50. Seulement il a bien fallu se rendre à l’évidence, les ressources finissaient par se tarir, un gisement pouvait être complètement épuisé et la production décliner. C’est ce qui s’est produit tant aux USA qu’en Russie. Alors ? Il a fallu chercher ailleurs. On sait aujourd’hui mieux ce qui s’est passé. Innombrables sont les guerres qui ont été menées avec en sous-main le souci d’obtenir un accès facile aux ressources et un approvisionnement sécurisé. Cela fait un siècle que l’on prétend faire la guerre pour toutes sortes de prétextes idéologiques… mais avec toujours un regard en coin sur la manne pétrolière ! Étant donné que la région du Golfe persique détient la grande majorité des ressources mondiales, il a fallu jouer le tout pour le tout. Installer sur place des régimes politiques fantoches, entièrement dévoués à la cause de l’Occident. Sécuriser la route du pétrole est une obsession du pouvoir politique depuis un siècle.

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    commentaires

Questions:

1. A lumière des investigations précédentes que peut-on penser de la "religion positiviste" d'Auguste Comte?

2. Y a-t-il un lien nécessaire entre monothéisme et intégrisme?

3. Faut-il considérer comme religion l'animisme des peuples premiers et si oui, en quel sens?

4. Faut-il marquer une différence de nature dans l'exercice du pouvoir au sein d'une institution religieuse et au sein d'un État?

5. La tolérance implique-elle seulement le respect des croyances différentes ou englobe-t-elle aussi l'incroyance?

6. Il existe un lien essentiel entre spiritualité et non-violence, comment pourrions-nous le formuler?

7. Que vous inspire la formule: "une seule religion,  une nation et un État"?

 

 

    © Philosophie et spiritualité, 2010, Serge Carfantan,
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